Au Canada, les femmes vivant avec le VIH sont des mères, des filles, des grands‑mères et des conjointes.
Leurs histoires individuelles sont uniques et complexes, mais elles ont un lien en commun. Elles sont, en quelque sorte, des sœurs.
Ensembles, ces femmes ont suscité une conversation concernant les obstacles aux soins anti-VIH axés sur les femmes à titre de pairs associés de recherche (PAR) pour l’Étude sur la santé sexuelle et reproductive des femmes vivant avec le VIH au Canada (CHIWOS).
Les PAR, regroupant notamment 33 femmes s’identifiant comme vivant avec le VIH, ont récemment reçu le Prix d’excellence en recherche ACRV-CANFAR dans le volet Recherche communautaire.
« Je me sens honorée, en même temps que fière pour tout le dur travail de chacune des femmes qui composaient notre équipe de PAR », de dire Claudette Cardinal, PAR de la Colombie-Britannique. « C’est un honneur d’être reconnue – et pour un événement d’aussi grande importance. Ce prix fait met en lumière ce que toutes les femmes vivant avec le VIH ont accompli en 2019. »
L’étude CHIWOS est un projet de recherche communautaire longitudinale multi-sites mené par, avec et pour les femmes vivant avec le VIH. L’étude, qui comportait trois phases d’entrevue distantes chacune de 18 mois a été exécutée en collaboration avec des chercheurs, des fournisseurs de services et des responsables de l’élaboration des politiques.
Entre août 2013 et mai 2015, les PAR ont interviewé plus de 1 400 femmes vivant avec le VIH, partout en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec.
Cette étude marquait la première fois où des femmes des collectivités vulnérables faisaient entendre leurs voix, racontant leurs histoires et exprimant leurs points de vue sur les obstacles auxquels elles font face lorsqu’il s’agit d’obtenir des soins de santé.
Brigitte, PAR qui a mené les entrevues au Québec, précise que cette étude pancanadienne d’imposait depuis longtemps.
« Nous devions absolument savoir ce qu’éprouvaient et ressentaient les femmes vivant avec le VIH dans diverses situations de leur vie. Puisque nous sommes toutes séropositives au VIH, nous pouvions déjà poser des questions très profondes, » dit-elle, ajoutant que les participantes sentaient qu’elles pouvaient être plus ouvertes concernant les rapports sexuels et la violence qu’elles avaient connue dans leur vie. « Je ne crois pas que nous aurions pu discuter de ces sujets aussi ouvertement si nous ne partagions pas le même statut. Cela a certainement contribué au succès de l’étude et à l’honnêteté et à l’authenticité des réponses reçues des femmes qui ont participé. »
Brigitte dit qu’elle voulait être PAR parce qu’elle souhaitait aider les autres femmes vivant avec le VIH. Elle, ainsi que les autres PAR dans l’ensemble du pays, possédaient les connaissances et l’expérience nécessaires pour mener ces entrevues avec respect et compassion.
« Chaque fois que je rencontrais une de ces femmes, peu importe l’endroit où cela se passait, je pouvais voir que chacune avait désespérément besoin de se raconter, » de dire Brigitte. « Elles avaient besoin de parler, de communiquer et d’être reconnues pour ce qu’elles sont et pour tout ce dont elles avaient fait l’expérience. »
Melanie Lee, qui était PAR en Colombie-Britannique, dit que leur travail s’est concentré sur la façon dont les soins axés sur les femmes peuvent améliorer la santé des femmes séropositives au VIH et identifier les besoins non satisfaits en matière de services de santé.
Elle ajoute avoir été personnellement touchée dans le cadre de son travail de PAR.
« Je suis intéressée par la recherche axée sur les femmes séropositives au VIH parce que je fais partie de cette tranche démographique, » d’expliquer Mélanie. « C’était une occasion de revenir dans le milieu de travail, car je n’avais pas travaillé depuis plusieurs années en raison de mes problèmes de santé liés au VIH et aux effets secondaires des médicaments. J’ai grand plaisir à faire du travail dans le domaine du service public, où je peux aider les gens à améliorer leur santé et leur mieux-être. »
Claudette, sa collègue en Colombie-Britannique, confie que le fait de devenir une PAR lui a permis de redonner à la collectivité.
Pour elle, l’expérience permettait de clore le cercle.
« Au moment où j’ai été diagnostiquée, mon médecin m’a proposé de participer à une nouvelle étude qui avait lieu à l’université où je devais prendre mes ARV, » explique‑t‑elle. « C’était mon premier contact avec la recherche en tant que participante. Fermer le cercle et être parmi celles dirigeant les entrevues, voilà pourquoi j’aime ce travail, sans oublier les liens tissés avec les autres femmes. C’est là ma récompense. »
À la fin de son enquête, ajoute-t-elle, l’une des participantes a demandé comment devenir PAR.
« Lorsque des femmes aident d’autres femmes à se responsabiliser, elles peuvent faire ce qui les passionne, » de dire Claudette. « Elles encouragent ainsi d’autres femmes séropositives au VIH à ne jamais renoncer à leurs rêves. »
Mélanie espère que le CHIWOS peut aider toutes les femmes séropositives au VIH à obtenir les services dont elles ont besoin pour atteindre une santé et un bien-être optimaux, réduire les stigmates et la discrimination – et, peut-être même, la violence.
« Ce que j’espère, ce que l’étude CHIWOS puisse aider davantage de cliniques à axer leurs services sur les femmes, mais toutefois, je crois qu’il faudrait parler de soins axés sur la personne, car chacun mérite des soins médicaux holistiques de qualité… peut-être créer un changement, » dit-elle.
Breklyn Bertozzi, qui était PAR en Ontario, estimait que le prix a été remporté haut la main par toute l’équipe.
Sur le plan personnel, Breklyn estime que le travail de PAR était extrêmement gratifiant.
« Je crois avoir grandi en tant que personne tout au long de l’étude. J’ai tellement appris et connu tant de moments touchants, » dit-elle. « Je suis une personne meilleure après avoir eu le privilège de coinnaître tant et tant de femmes solides, celles que j’ai rencontrées au cours de l’étude CHIWOS. »
Elle dit espérer que la recherche aidera à améliorer la prestation des soins et des services sociaux à l’intention des femmes vivant avec le VIH dans les collectivités où le besoin est le plus pressant.
Jusqu’à maintenant, l’équipe des PAR a cosigné 30 publications examinées en comité de lecture et six manuscrits dans des périodiques à comité de lecture et leurs travaux de recherche ont été exposés dans des présentations lors de congrès locaux, nationaux et internationaux. La recherche des PAR sur les soins axés sur les femmes atteintes du VIH a été également intégrée dans une trousse d’outils visant à sensibiliser les femmes et les fournisseurs de soins de santé.
« L’étude CHIWOS offre une perspective de ce dont ont besoin la majorité des femmes dans chaque collectivité où l’étude a été menée, » de dire Breklyn. « J’espère que l’information que nous avons recueillie est prise très sérieusement par les personnes qui ont la capacité d’apporter de vrais changements. »
Claudette nous offre ses réflexions finales : « Hé! Ho! Traité numéro quatre accueillant un parent du territoire du Traité numéro six… J’avais l’impression de revenir chez moi… Wuniska… réveillez-vous, levez-vous et tenez-vous debout! Cette femme crie est extrêmement fière et souhaite prendre un instant pour réfléchir à toutes les femmes qui sont entrées dans le monde de l’Esprit et à TOUTES LES FEMMES vivant avec le VIH/sida, qu’elles demeurent fortes, qu’elles n’abandonnent pas… aidons-nous mutuellement à nous relever… chacune de nous a un don, à partager avec celles et ceux qui veulent en savoir plus sur leurs propres dons intérieurs, ces dons qui nous ont toutes maintenues dans l’unité tout au long de la recherche… Femmes de l’étude CHIWOS, mes applaudissements vont à vous toutes, à ce que vous êtes. … Félicitations! »