L’important, c’est d’avoir la passion et, en l’occurrence, il est question de santé, de justice sociale et de réaction au racisme.
À la fin des années 1980, M. Winston Husbands (PhD) vivait en Afrique du Sud. Il se souvient qu’à l’époque, il commençait à être question du VIH et du sida, mais qu’« on en parlait très discrètement ». Souvent, il s’agissait de rumeurs selon lesquelles « un tel et un tel sont décédés du sida ».
« Après mon retour au Canada, je ne savais pas à quel point le VIH était un problème pour les gens de race noire au Canada », disait-il. « Certains de mes amis m’ont parlé de la Black Coalition for AIDS Prevention et c’est ainsi que tout a commencé pour moi. Tout simplement par véritable intérêt personnel. »
Le travail de M. Husbands sur le VIH a commencé au début des années 1990 à titre de bénévole et membre du conseil d’administration de la Black Coalition for AIDS Prevention.
« C’était par simple intérêt personnel, je voulais faire ma part – quel qu’elle soit – dans la réponse contre le VIH dans les collectivités noires de Toronto. »
M. Husbands précise que la « santé » n’a jamais été pour lui un objet d’étude pendant ses années de premier cycle et de deuxième cycle.
« Puisque j’étais bénévole, j’apprenais sur le tas, pour ainsi dire. Je suppose que c’est cela d’être bénévole. Vous n’avez pas à posséder un savoir extraordinaire en quoi que ce soit, » de dire M. Husbands. « Il faut de la passion et, dans ce cas, il était question de santé, de justice sociale et de lutte contre le racisme. »
Pour ce qui est de la connaissance du VIH, il l’a acquise dans l’organisation, dans le cadre d’un environnement d’apprentissage permettant aux bénévoles d’apprendre tout en travaillant.
« Cela me convenait parfaitement. »
Depuis 2001, M. Husbands a axé son travail sur les recherches sur le VIH, le développement des collectivités et l’activisme en tant que directeur de la recherche du comité du sida de Toronto, à titre de coprésident du Conseil des Africains et Caraïbéens sur le VIH/sida en Ontario (CACVO) et tout récemment à titre de scientifique principal du Réseau ontarien de traitement du VIH (ROTV).
M. Husbands est reconnaissant au regretté Charles Roy qui est devenu directeur général du comité du sida de Toronto (ACT) en 1996 pour avoir façonné son approche à la recherche communautaire.
« Il avait une passion du travail. Il avait sa manière de voir de quelle façon les collectivités devraient participer à ce travail. La façon dont les collectivités devraient animer ce travail. Voilà pourquoi j’étais très reconnaissant d’avoir commencé tandis que Charles Roy était encore parmi nous. »
M. Roy est décédé de complications du VIH à l’Hôpital de Toronto le 24 août 2002, mais il avait pu auparavant mettre en contact M. Husbands avec un réseau de personnes et d’agences qui se consacraient à contrer le VIH et le sida.
M. Husbands a été en première ligne pour veiller à ce que l’Ontario comprenne en quoi les inégalités structurelles ont des répercussions sur la vulnérabilité des Afro-Canadiens au VIH et pour défendre des solutions plus appropriées, efficaces et originales culturellement.
M. Husbands est un champion exemplaire et inspirant dans le domaine du VIH, un meneur communautaire, un chercheur et un mentor, » de dire Mme Josephine P. Wong (PhD), professeure agrégée à l’école des sciences infirmières Daphne Cockwell et professeure auxiliaire à la Dalla Lana School of Public Health. « Il a contribué de façon inégalable à la réponse au VIH dans les collectivités noires, grâce à ses recherches. »
M. Husbands était également présent à la création d’une plateforme de recherche pour éclairer la réaction au VIH dans les collectivités africaines, caraïbéennes et noires, aux niveaux local, national et international.
Wangari Tharao est directrice de la recherche et des programmes au Women’s Health in Women’s Hands CHC, coprésidente du comité de la recherche du CACVO et présidente de l’African and Black Diaspora Global Network on HIV and AIDS.
Selon elle, le travail de M. Husbands « imprime un leadership, établit le lien entre les intervenants dans l’ensemble de l’Ontario et transforme les conclusions de la recherche en interventions » qui ont d’importantes conséquences au niveau santé.
M. Husbands a été directeur ou co-enquêteur dans plusieurs projets de recherche communautaire, a agi comme mentor de collègues, stagiaires et membres de la collectivité sur les nuances de la recherche communautaire et a dirigé une bourse d’études sur le renforcement des capacités dans ce domaine.
« C’est également un passionné, désireux d’établir une masse critique pour veiller à ce que davantage de chercheurs ACN entrent dans le domaine par le mentorat et le renforcement des capacités communautaires, de façon à se lancer en recherches sur la santé et le VIH. »
M. Husbands croit que les collectivités « ont des intérêts » et que le VIH est un intérêt essentiel pour les collectivités qui sont les plus affectées par le virus et c’est pourquoi elles doivent être présentes dans la recherche.
« Les collectivités, ce ne doit pas être simplement les personnes auxquelles vous vous adressez pour répondre à un sondage ou à un ensemble de questions. »
« L’activisme connaît une véritable résurgence et cette résurgence nous entraîne en des lieux où nous avions peut-être oublié que nous pouvions aller, » de dire M. Husbands. « Cela, je crois, a ajouté une nouvelle sorte d’urgence, en même temps qu’un nouveau type d’espoir dans le travail que nous faisons. »
Récemment, M. Husbands cherchait un rapport de l’Agence de la santé publique du Canada sur ce que celle ci appelle les « disparités en matière de santé ». Il dit avoir été frappé par tous les éléments qui manquaient.
Dans ce très long rapport, je n’ai rien pu voir à propos de la race ou du racisme (et il n’y était même pas) question de « négritude »
M. Husbands dit n’être pas certain que les experts et les structures qui gèrent et jouent un grand rôle dans la « santé » au Canada comprennent ces problèmes ou ce qu’ils signifient pour eux.
« Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir avant de parler d’« intersectionnalité », etc., car je ne suis pas sûr que certaines des personnes qui prennent vraiment les décisions sur ce qui arrive en matière de santé et de soins de santé ou dans le système de soins de santé comprennent ce concept ou en tiennent compte d’une certaine façon. »
M. Husbands rappelle qu’il n’utilisait « intersectionnalité » que comme exemple, car il pourrait mentionner d’autres aspects, par exemple la compétence critique en santé, notamment.
« Certainement dans le contexte du racisme, » disait-il, réfléchissant à la discussion précédente sur l’intersectionnalité. « Il est certain que ce sont des enjeux pour les chercheurs et que les chercheurs du domaine du VIH ne sont pas tous à l’aise avec ces idées et ces concepts. »
Il estime qu’il est possible que certaines personnes n’aient pas su comment appliquer ces concepts et idées ou les utiliser avec des types différents de personnes, pour ce qui en est.
« Parfois, en fait, ce sont les décideurs qui semblent être imperméables à ce que nous essayons de dire à propos de la santé, du racisme, etc. » d’ajouter M. Husbands.
Interrogé à savoir s’il voulait aborder quelque autre sujet, M. Husbands a pris une forte respiration et s’est arrêté avant de répondre.
« Certains d’entre nous ont dû lutter pour être ici et pour être à certaines tables. Vous savez, ce n’a pas été facile et j’ai connu mes propres difficultés avec l’ACRV en matière de race et de représentation. »
Par l’action collective, M. Husbands estime que les collectivités noires voient maintenant quelques percées.
« J’espère que nous avons acquis assez de force pour avancer, faire avancer les priorités, même plus que ce que nous avons pu faire depuis quelques années, » de dire M. Husbands.
« Pour la plus grande partie du temps où j’ai fait ce travail, l’ACRV n’y portait tout simplement pas toute l’attention nécessaire pour s’intéresser à ceux qui faisaient de la recherche, qui pouvait être chercheur, pourquoi la catégorie des chercheurs comprenait un certain type de personnes et non d’autres. »
M. Husbands dit espérer que tous ont « franchi une étape » sur ce plan et que, dorénavant, l’ACRV deviendra un allié puissant qui, lorsque sollicité ou au besoin, « nous aidera à concrétiser certaines des réalisations nécessaires. »
« Et quand je dis nous, je veux dire les chercheurs noirs ou les Noirs ont qui ont un lien avec la recherche. »